L’impact économique de la perte de vision

De l’impact sur l’autonomie à la limitation des activités quotidiennes, en passant par l’entrave à la mobilité, il est relativement facile d’identifier les conséquences que la perte de vision peut avoir sur un individu. Mais qu’en est-il de l’impact économique ? 

Selon le rapport du Lancet Global Health Commission intitulé Global Eye Health : vision beyond 2020, la perte de productivité annuelle mondiale due à la déficience visuelle est d’environ 410.7 milliards de dollars US en parité de pouvoir d’achat. Bien que ce chiffre soit stupéfiant, les données montrent ce que nous, à l’Organisation pour la prévention de la cécité (OPC), savons déjà : investir dans la prévention et le traitement de la perte de vision permet de réaliser d’importantes économies et profite à la fois aux individus et aux sociétés. 

Pourtant, les conséquences du manque d’accès aux soins oculaires ne cessent de s’aggraver. En parallèle, le nombre d’individus atteints de perte de vision augmente du fait du vieillissement de la population mondiale. Or, l’étude la plus récente de Deloitte Center for Health Economics montre que dans les pays étudiés, seulement 1,5 à 2,7 % des dépenses en santé publique sont dédiées aux soins oculaires ( Investment in eye health to prevent sight loss ). Étant donné que 90 % des déficiences visuelles dans le monde sont évitables, il est temps de sérieusement s’occuper de la vue.

 

Quatre conséquences économiques de la perte de la vue

L’étude de l’impact économique de la perte de vision nous conduit à l’identification de quatre conséquences graves, tant sur le plan individuel que sociétal.

  • L’accès à l’éducation : Les enfants et les jeunes adultes souffrant d’une perte de vision peuvent être confrontés à des difficultés d’accès à l’éducation, et par prolongement à l’emploi. Leurs ressources financières peuvent donc être sévèrement impactées. 
  • La productivité : La perte de vision peut entraver la capacité d’un individu à travailler efficacement. En effet, une telle condition peut entraîner une baisse de productivité, de l’absentéisme ou des départs en retraite anticipée, entrainant alors une charge économique importante pour l’individu et son employeur.
  • Le coût des soins de santé : Le traitement des affections liées à la vision et la structure d’aides apportées aux personnes souffrant de troubles de la vue peuvent être coûteux. Les dépenses en matière de santé oculaire comprennent entre autres les traitements médicaux, les interventions chirurgicales, les appareils d’assistance et les services de réadaptation. Une fois encore, la charge économique peut être très élevée pour les individus concernés.
  • Les coûts pour la société : Au-delà du coût des soins et de l’impact sur la productivité et l’insertion professionnelle, la perte de vision impose des coûts indirects à la société dans son ensemble. Ces coûts peuvent être liés à la dépendance accrue des personnes mal ou non-voyantes aux services sociaux, à la réduction de leur qualité de vie et leur besoin d’aides financières supplémentaires.

 

Les arguments en faveur de l’investissement dans la santé oculaire 

Investir dans la santé oculaire n’est pas seulement éthique – garantir le droit à la vue pour tous – c’est aussi un choix économique qui s’impose à tous. Par exemple, on estime que pour chaque dollar investi dans le traitement de la cataracte, 20 dollars sont réinvestis en retour dans l’économie. (Transforming Lives : An Investment Case for Eye Health).

C’est ce qu’ont démontré les résultats de l’étude menée en 2018 par The Lancet sur l’effet de la distribution de lunettes correctrices sur la productivité des cueilleurs de thé ruraux atteints de presbytie en Inde. Dans la cohorte de 2700 cueilleurs de thé de plus de 40 ans souffrant de perte de vision, une moitié d’entre eux choisis au hasard ont reçu des lunettes gratuites, pour un coût de 10 à 20 dollars par personne. Leur productivité a ensuite été mesurée en fonction de la quantité de thé récoltée. Les résultats ont montré une « augmentation substantielle de la productivité » (plus de 5kg supplémentaires de thé cueillis par jour) pour ceux ayant reçu les lunettes correctrices.

Si le simple fait de fournir des lunettes à la cohorte testée a stimulé l’activité agricole locale, il a également eu un impact économique sur les individus puisque ces derniers sont rémunérés en fonction de leur productivité.

 

Des mesures pratiques pour tous

Bien que la solution pour réduire l’impact économique de la perte de vision soit complexe, il existe des moyens accessibles pour que chacun d’entre nous puisse faire la différence. 

La détection et l’intervention précoces peuvent prévenir ou retarder la perte de vision. L’investissement dans des contrôles annuels de la vue et dans des stratégies de prise en charge précoce peut réduire de manière significative le fardeau économique à long terme de la déficience visuelle. 

En outre, chacun d’entre nous peut sensibiliser le public à la santé oculaire. En expliquant l’importance des examens oculaires réguliers, on peut encourager un comportement proactif de recherche de soins pour la vue. Une personne informée est plus susceptible de prendre des mesures pour préserver sa vision.

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Le rôle de la société dans le droit à la vue

Il est tout aussi essentiel que les pays déploient des ressources publiques dans la santé oculaire. 

Le récent rapport de Deloitte, intitulé Investment in eye health to prevent sight loss, présente quatre appels à l’action susceptibles d’avoir un impact sur la santé oculaire des 1,1 milliard de personnes dans le monde vivant avec une perte de la vue évitable.

  • Information : Allouer des ressources pour améliorer la collecte de données nationales sur la prévalence, les facteurs sous-jacents, les résultats et les conséquences de la perte de vision permettrait aux décideurs politiques de comprendre les besoins en matière de soins oculaires et d’agir en connaissance de cause.
  • Leadership : Investir dans la création d’un plan stratégique national pour la santé oculaire jouerait un rôle central dans l’avancement de la prise en charge de la vision, l’orientation des politiques et l’orchestration des stratégies dans le domaine de la santé oculaire, tout en favorisant la collaboration entre les principales parties prenantes.
  • Aménagements sur le lieu de travail : Les employeurs peuvent jouer un rôle crucial en proposant des aménagements et un soutien aux employés souffrant d’une perte de vision afin de les aider à rester sur le marché du travail et à contribuer à l’économie locale et nationale.
  • Services : Allouer des ressources aux services de soins oculaires préventifs et de prise en charge précoce favoriserait l’amélioration des résultats en matière de santé oculaire et réduirait simultanément les dépenses globales du système.
  • Le rôle de l’OPC dans l’accessibilité à la santé oculaire 

 

L’Organisation pour la prévention de la cécité (OPC) se consacre à l’amélioration de l’équité en matière de santé oculaire en Afrique francophone, qui reçoit beaucoup moins d’aide que les pays anglophones. Des rapports récents ont confirmé le besoin urgent d’investissements supplémentaires, tant au niveau personnel qu’organisationnel.

Ensemble, nous pouvons avoir un impact sur les personnes sujettes à la cécité évitable.

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